La rue, à la manière d'un épiderme, est chargée de signes rituels. Ces derniers peuvent prendre des formes extrêmement diverses et difficilement interprétables (de quoi entretenir la fascination du voyageur qui les découvre). Celui qui se met à les chercher et à les suivre pourra passer un long moment à parcourir la ville. Colorés, organiques, putrescibles et odorants, on en trouve sur les portes, les arbres, les trottoirs, parmi les déchets et dans les recoins les plus triviaux. Déjouant une certaine "sacralisation"/"sacralité" que l'on serait de prime abord tentés de projeter sur eux , ces signes, bien que religieux, s'intégrent sans emphase dans la vie quotidienne.
(Photos prises dans la vallée de Katmandu en avril 2010)
Les statues de divinités, "chargées" par le flux des fidèles, s'augmentent d'une pellicule organique (qui va parfois jusqu'à entièrement les recouvrir), de couleurs éclatantes et d'une odeur tenace accompagnée de mouches - si bien qu'une statue semblable, aperçue ensuite dans la vitrine d'un musée, coupée du cycle des offrandes qui semblent quotidiennement irriguer la pierre, apparaîtra éteinte, nue et terne.
(Je me souviens du grand effet que firent sur moi ces deux torchons maculés de peinture, disposés de part et d'autre de la porte du temple de Shiva à Tansen, accrochés sous des miroirs dont le fidèle se sert pour poser correctement le tika sur son front. Le tika est une marque entre les deux yeux, le plus souvent un point de peinture rouge (le tika noir est réservé aux jeunes filles non mariées), parfois mélangé à du riz pour former une préparation épaisse
les femmes mariés et les hommes est couleur rouge , tandis que |
